Dans le scriptorium

Publié le par JP

"Dans le scriptorium". Paul Auster. Éditions Actes Sud.

 

 

 

Le nouveau roman (?) de Paul Auster est sorti. Il s'intitule, "Dans le scriptorium". Il met en scène un homme, que nous appellerons Mr. Blank. Il est vieux, il est enfermé dans une chambre mais ignore où (et à fortiori dans quoi) cette chambre se trouve elle-même. La porte est fermée (mais il ignore si elle est fermée de l'extérieur ou de l'intérieur). Il a des problèmes de mémoire. Plusieurs personnages viennent le visiter. Très vite, les habitués de Paul Auster reconnaîtront d'anciens héros croisés autrefois. Anna Blume, Quinn, Benjamin Sachs… chacun apporte sa petite pierre à l'édifice. Qui est Mr. Blank ? Que fait-il là ? On sait, dés le début, qu'il est étroitement surveillé. Que ses moindres faits et gestes sont consignés. Étudiés. Rapportés. Pourquoi ? ça, en revanche, on ne nous le dira jamais. Car le livre d'Auster, comme tous ses livres ou devrais-je dire, plus que tous ses autres livres, est une mise en abîme. D'Auster lui-même. Du métier (?) d'écrivain. Paul Auster vient de fêter ses 60 ans. Et il doit mal le vivre. On sent que ce Mr Blank c'est un peu lui. Un homme qui a créé d'autres vies, sur le papier, et qui s'y trouve confronté. Qui doit rendre des comptes. Sur le bureau qui se trouve dans sa chambre, Mr Blank découvre un manuscrit. Inachevé. L'histoire d'un homme parti en expédition dans des terres interdites, confrontés à une solide mécanique dictatoriale qui, pour unifier son peuple et asseoir son pouvoir, a décidé de trouver un ennemi commun, quitte à le créer (toute ressemblance avec des événements réels n'est sans doute pas fortuit). Il consigne par écrit son histoire. Certain qu'elle servira aux autorités pour pouvoir l'exécuter. Réalité ? Fiction ? Mr Blank, lui, ne saurait le dire. On lui demande de finir d'écrire l'histoire. D'imaginer la fin. Comme une sorte de thérapie.

Comme dans "La nuit de l'oracle", Paul Auster s'amuse à écrire des récits au cœur de son récit. A-t-il trop d'imagination et peur de ne pouvoir mener à bien tous ses projets, qu'il les imbrique ainsi les uns dans les autres ? Ou bien s'agit-il simplement de paresse ? De peur de s'engager dans un autre roman ? Peur de perdre le fil d'une histoire et de la laisser s'échapper ? S'évanouir ? Disparaître. La fin est une nouvelle mise en abîme (mais je n'en dirais pas plus cette fois). Blank. Auster. Quinn. Blume. Ce roman, qui n'en est pas vraiment un, se lit d'une traite. On se laisse doucement emmener par ce style unique et d'une grande fluidité (comme toujours). Un bon moment donc. Mais pas inoubliable. Un petit Auster qui ne demande qu'à mûrir pour devenir grand. À déguster (pour les amateurs) mais à ne pas recommander à ceux qui ne connaîtraient pas encore cet auteur.

 

Le magazine LIRE publie ce mois-ci (et sur son site web) une grande interview de l'auteur:

 

http://www.lire.fr/entretien.asp/idC=50949/idR=201/idG=4

 

 

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B
Bonjour JP,je découvre ta critique sur ce roman après avoir écrit le mien sur mon blog et nous sommes assez d'accord sur la conclusion.Roman à déguster mais surtout pas pour découvrir Paul Auster. De mon côté, je conseille Moon Palace ou le livre des illusions.Je mets un lien à ton blog sur le mien.Bien à toi et merci,BenoitD
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