Messe noire, O. Barde-Cabuçon.

Publié le par JP

 

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Je n’ai pas pour habitude de reprendre les 4eme de couverture (beaucoup trop simple) mais une fois n’est pas coutume et je ne sais pas pourquoi, je m’en vais céder à la facilité. Enfin, quand je dis, « je ne sais pas pourquoi », c’est une figure de rhétorique car je sais très bien pourquoi. Parce que ça plante admirablement le décors, présente les personnages, en quelques mots l’intrigue, sans toutefois trop en dévoiler et qu’à partir de là, je vais pouvoir divaguer en toute quiétude sans m’inquiéter ni des conséquences ni des éventuelles retombées.

4éme de couverture donc :

« Une nuit de décembre 1759, le corps sans vie d’une jeune fille est retrouvé sur la tombe glaciale d’un cimetière parisien. Pas de suspect, et pour seuls indices : une hostie noire, un crucifix et des empreintes de pas. Un panneau placardé sur la grille d’un autre cimetière donne le ton : “Interdit à Dieu d’entrer dans ce lieu.” La tension est à son comble dans la capitale. Sartine, le lieutenant général de police, craint une résurgence des messes noires sous le règne du très contesté Louis XV.
Volnay, le commissaire aux morts étranges et son non moins étrange compagnon, le moine hérétique, se trouvent rapidement confrontés à des forces obscures et manipulatrices. Toujours aussi mal vu du pouvoir en place, sous la férule d’un Sartine plus méfiant que jamais, le duo d’enquêteurs ne pourra compter que sur lui-même pour démasquer les ordonnateurs du rituel satanique. »

À quoi avons-nous affaire ? Un rituel satanique, un moine hérétique, le XVIIIéme siècle dans ce qu’il a de plus sombre, une enquête, des rebondissements … voilà qui avait tout pour m’intriguer, m’attirer, me coincer dans ses filets, me… argh, ça y est, je suis fait comme un rat.
Trop tard.

Revoici donc Volnay, commissaire aux morts étranges de son état, en pleine enquête au cœur du Paris des ténèbres (et des vases de nuit que l’on déverse par les fenêtres sans se soucier des passants). Il est à nouveau accompagné de son com-père, moine défroqué à la langue bien pendue, plus proche des philosophes qu’il vénère que des religieux à robe de bure auxquels il ressemble, séducteur, beau parleur, dangereux pour tous et surtout pour lui-même.
Pourquoi « à nouveau » ?
Tout simplement parce que cette aventure-là est la seconde en date du duo romanesque. Après « Casanova et la femme sans visage », chroniqué ici même, souvenez-vous : http://www.flu.fr/zal-gosse/critiques-prends-290/blog/casanova-olivier-cabucon-1583871.html.

Une nouvelle enquête, donc, sur fond de scandale aux plus hauts degrés de l’Etat (bien qu’on le nomme encore royaume à cette époque). Car au travers de ce rituel inversé, de cette messe dite à l’envers qui donne son titre au roman, c’est à une autre affaire, bien réelle celle-là, que nous renvoie l’auteur. Un scandale, qui pèse sur ce récit comme une ombre tutélaire et malfaisante, celui de…(roulements de tambours)… l’affaire des poisons.

Ici, un rapide retour en arrière s’impose : L'affaire des Poisons est une série de scandales impliquant des empoisonnements survenus entre 1679 et 1682, sous le règne de Louis XIV et qui secouèrent Paris et la Cour. Dans un second temps, sept ans après les faits et trois ans après l’exécution de la Marquise de Brinvilliers et de son valet La Chaussée, l’affaire rebondit sur le terrain des messes noires…

Avouez tout de même que ça a plus de gueule qu’un banal compte en Suisse (même dissimulé, menti puis avoué (pléonasme bancaire)).

Pour ceux et celles qui souhaiteraient en savoir plus, l’intégralité de l’article se trouve à l’adresse suivante (j’avoue le copier/coller avant qu’on ne m’en accuse) :

http://fr.wikipedia.org/wiki/Affaire_des_Poisons

De cette « matière », Olivier Barde-Cabuçon tire un thriller historique qui mêle habillement réalité historique et fantaisie fantastique, on y croise des sorcières, quelques catins de plus ou moins basse extraction et un certain nombre d’assassins (qui courent les rues, la nuit venue, les épées à la main).
Là où Frédéric Lenormand et son Voltaire enquêteur distille une langue enjouée et des scènes cocasses, Olivier Barde-Cabuçon, lui, s’attache davantage aux travers de l’âme humaine. Le personnage du moine (qui renvoie au comparse de Voltaire chez F. Lenormand, curieuse coïncidence) amène une légèreté rapidement chassée par la grise froideur des faits, l’implacabilité des participants. Un roman plus froid, plus mécanique aussi, mais d’une mécanique d’horloger. Car l’auteur sait où il veut nous conduire et rien ne semble en mesure de lui faire quitter la voie qu’il s’est tracée. Quelques rebondissements, comme il se doit dans de pareilles cas (dont un, en particulier, qui aurait pu nous conduire à perdre le fil mais qui, sur la lame du rasoir, parvient à nous maintenir en haleine). Du bel ouvrage, disais-je donc, classique dans son fond comme dans sa forme mais « diablement » efficace et rondement mené. Pour les amateurs du genre (mais pas seulement).


Titre : Messe noire
Auteur : Olivier Barde-Cabuçon
Editions : Actes Sud (collection actes noirs)

Sur le site de l’éditeur : http://www.actes-sud.fr/catalogue/romans-policiers/messe-noire

A noter que le premier opus des aventures du commissaire aux morts étranges est dorénavant disponible en version poche (un bon moyen de faire connaissance avec ce personnage) :
http://www.actes-sud.fr/catalogue/romans-policiers/casanova-et-la-femme-sans-visage-babel-noir

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